Il se destinait à une carrière footballistique. Sportif de haut niveau au Stade Rennais, Arnaud Géraux décide pourtant de se lancer dans un CAP puis BP Coiffure à l’école Jacques Bedfert. Grand bien lui en a pris. A seulement 20 ans, il ouvre son premier salon. Puis un second, un troisième… Aujourd’hui, il est à la tête de 8 salons Nuance à Rennes, avec sa compagne Stéphanie qui gère la partie administrative.
« Je suis passionné. Boulimique de mon métier. Et fier d’avoir gravi les échelons en tant qu’indépendant. A force de travail et de persévérance. Je me suis formé sans cesse pour évoluer, en coiffure, bien sûr mais aussi au management, au marketing, à la gestion… » souligne l’entrepreneur. Nous avons voulu lui donner la parole concernant les problèmes de recrutement que connait la profession. Riche de son expérience et fort de sa réussite, il nous a semblé tout légitime pour apporter son regard d’expert.
Les solutions apportées par ses confrères comme la fermeture le week-end ou une hausse démesurée du salaire ?
Arnaud Géraux a un avis bien tranché sur la question ! « J’ai l’impression que la profession fait n’importe quoi ! Cela part dans tous les sens et on est train de tuer le métier. Les coiffeurs sont en train de se tirer une balle dans le pied en lâchant trop de leste. Et ils ne mesurent pas les conséquences de leurs décisions sur l’avenir. D’un côté, il y a ceux qui proposent des salaires élevés pour attirer les candidats. Je suis totalement en accord avec le fait qu’il faut revoir la grille de salaire. Mais cela ne doit pas mettre en péril un salon. Or, beaucoup de patrons ne connaissent pas leur marge. Il y a des charges fixes qui font qu’il faut générer un certain chiffre d’affaires. Récemment une de mes collaboratrices a été démarchée. Le concurrent lui propose 2200 euros. Mais un tel salaire inclut qu’elle doit rapporter au moins 9000 euros. » Augmenter le salaire, dans l’absolu, vous l’aurez compris, le Rennais est pour ! « Mais il faut alors augmenter les tarifs. Et donc augmenter les compétences. Cela passe par la formation. C’est le cœur de notre métier. »
Et que pense-t-il de l’aménagement des horaires avec, par exemple, la fermeture le samedi ?
« Je comprends que les mentalités évoluent. Mais on ne peut pas faire des plannings à la carte. Certains salons vendent du rêve en affirmant fermer les week-ends. Souvent ce sont des coups de communication. Les autres ne tiendront pas sur la durée. Ils mettent en péril leur affaire. On ne peut pas tout accepter ! Il faut garder un certain cadre » précise-t-il.
Mais quelles solutions envisage-t-il alors pour revaloriser le métier auprès de la jeune génération ?
« Il faut mettre en avant les coiffeurs qui oeuvrent au quotidien pour ce beau métier. C’est un métier de passion. On peut atteindre des sommets quand on est passionné, travailleur et curieux de tout. Les jeunes n’attendent pas seulement qu’on leur propose un salaire élevé. Ils veulent être former, progresser, évoluer. Quand un junior – c’est comme cela que j’appelle les apprentis – arrive dans un salon, il faut lui proposer un plan de formation sur deux ans. Fini le temps où il passait le balai ! Il faut qu’il puisse être sur clientèle dans les 4 mois après son arrivée. Et pour cela, insister pour qu’il s’entraine sur modèle toutes les semaines. En lui donnant des étapes dans sa formation et par conséquent des perspectives, on va le motiver. Un jeune a besoin de bouger, il n’aime pas la routine. Il faut le faire rêver ! Et pour cela, il faut susciter son admiration. Etre son mentor » explique-t-il.
« Il faut aussi voir quel potentiel il a. Il y a forcément des domaines où il brille davantage. Il faut exploiter toutes les possibilités. Par exemple, il peut apporter son expertise sur les réseaux sociaux. Il a besoin de reconnaissance. Et quand on l’investit sur une mission, il est motivé. »
Autre problématique que l’entrepreneur soulève ?
Le cursus scolaire. « Il n’est plus adapté du tout au quotidien des salons et à la réalité du métier. A l’heure où les jeunes sont hyperconnectés sur leur téléphone, pourquoi leur apprendre, par exemple, à monter des permanentes ? Les épreuves à l’examen ne répondent pas du tout aux attentes d’aujourd’hui. Certes, une permanente apprend une certaine dextérité. Mais cela ne donne pas une image moderne du métier. L’épreuve de coupe homme dure une heure… Qui passe une heure chez son coiffeur aujourd’hui ? C’est complétement décalé ! » De manière générale, Arnaud Géraux reproche le manque de dynamisme des institutions. « Bien souvent elles renvoient une image ringarde de la coiffure. Il faut apporter un souffle de modernité. En communiquant sur les réseaux sociaux par exemple. Nous exerçons un beau métier. Mais il n’est pas valorisé ! Il faut mettre en avant les savoir-faire. Soyons inventifs et créatifs comme a su le faire le monde de la restauration. Ils ont su innover. La coiffure reste dans sa petite zone de confort. C’est dommage ! »