« 6 épisodes, plus de 300 coiffeurs et une équipe de 4 coiffeuses passionnées pour la saison 6 de La Guerre des Trônes… » Voici comment Beata Bourillon a résumé son expérience sur le tournage de la série historique, qui, présentée par Bruno Solo et diffusée sur France 5, retrace la véritable histoire de l’Europe, de la guerre de 100 ans à la fin du XVIIIème siècle.
En effet en parallèle à ses différentes activités – dont son concept de formation sur-mesure -, Beata Bourillon a trouvé le temps de s’impliquer dans cette émission de télévision historique. La saison 6 raconte la jeunesse du futur roi Louis XVI et sa rencontre avec sa future femme, Marie-Antoinette. Elle décrypte aussi les enjeux et les conséquences de la guerre des Sept Ans, durant laquelle la France perd ses colonies au Canada. Elle montre aussi le rôle clé de la Russie impériale dans la politique européenne et le soutien de la France envers les insurgés américains qui veulent gagner leur indépendance vis-à-vis de l’Angleterre… Bref, une saison riche historiquement, politiquement… Mais aussi capillairement !
Comment êtes-vous arrivée sur La guerre des trônes ? Quelles sont les qualités requises pour participer à un projet d’une telle envergure ?
« Avant tout, c’est par connaissance. J’avais déjà travaillé sur plusieurs tournages et la chef coiffeuse me connaissait. Il faut quand même répondre à plusieurs critères pour pouvoir accéder à ce type de programme. La chef coiffure doit vous faire confiance. Il faut être reconnu pour son sérieux. Et être disponible ! Cette partie du tournage s’est déroulée en deux fois 15 jours, une partie dans un château à côté d’Angers, une autre partie à côté de Tours. Cela inclut d’être disponible à 100 % ! Les coiffeurs n’ont pas forcément besoin de tout maitriser, la chef coiffure dispatche le travail selon les affinités et la maitrise technique.«
Vous annoncez 300 coiffeurs… L’expérience doit être extrêmement enrichissante ! Pouvez-vous nous en dire d’avantage sur votre travail lors du tournage ?
« Cette saison se situe au 18ème siècle et englobe une partie du règne de Louis XV et de Louis XVI. C’est une période de transition pour la géopolitique du monde et de l’Europe. Quand je parle de 300 coiffures, certaines ont été réalisées plusieurs fois sur plusieurs jours quand le rôle le nécessitait. Cela demandait beaucoup de travail en amont pour la chef coiffure.
Nous avons créé des coiffures pour l’armée, les paysans, le peuple, la noblesse, le clergé, la justice… Les journées étaient longues. Nous arrivions tôt le matin puis finissions tard après le tournage. Comme il y avait beaucoup de perruques en cheveux naturels, il fallait ensuite les laver. Comme nous n’étions que 4 coiffeuses, nous arrivions parfois à 6 h pour préparer les perruques puis nous finissions à 22 h pour les laver pour des questions d’hygiène. La noblesse portait beaucoup de perruques extravagantes.«
C’est en effet une période très intéressante d’un point de vue capillaire. Comment la chef coiffure a-t-elle imaginé les coiffures ? Comment a-t-elle ensuite dispatché le travail ?
« Avant même de commencer le tournage, elle nous a donné en amont de la documentation avec les styles de coiffure qu’elle voulait pour chaque acteur. Elle est partie de l’iconographie de l’époque, des peintures et des images. Puis lors du tournage, le matin, elle établissait le programme avec les différentes coiffures que nous avions à réaliser, selon tel ou tel rôle. Elle s’est aussi permis quelques libertés en restant dans les codes de l’époque, utilisant par exemple rubans, perles et plumes.
Préparer une perruque nécessite une grande préparation, d’une heure au minimum. Une fois prête, la pose ne prend qu’un quart d’heure finalement. Le travail était dispatché selon nos compétences et nos préférences. La chef coiffure nous a donné des directives pour qu’il y ait une homogénéité dans la réalisation. Par exemple, quand on créé la coiffure de Madame de Pompadour, le résultat doit être le même quelque soit la coiffeuse qui la réalise. On essayait toutefois de faire en sorte qu’un rôle soit réalisé par la même coiffeuse au fil du tournage. La difficulté majeure était de rendre la perruque le plus naturel possible, l’intégrer dans la chevelure. »
Que garderez-vous de ce tournage ?
« C’est une période très riche, connue du grand public avec des personnalités comme Madame de Pompadour ou Marie-Antoinette. Le style est extravagant, un peu fou, volumineux. Je suis passionnée par l’histoire. Je lis beaucoup de romans historiques. J’aime l’histoire de la coiffure mais l’histoire en générale. On dit souvent que connaitre son histoire permet de mieux appréhender le présent et l’avenir. On a une autre vision des choses. J’ai beaucoup appris de l’expérience en elle-même mais aussi de la chef coiffure qui m’a donné des outils et ses méthodes, celles du cinéma. Artistiquement, cette expérience m’a permis de gagner en légèreté. Moins s’attarder sur le petit détail et voir un look dans sa globalité pour aller à l’essentiel.
Il fallait avancer… Le défaut devient même une qualité ! Je me suis rendue compte aussi qu’en s’entrainant, en travaillant on peut tout faire ! Il suffit de le vouloir et de s’en donner les moyens. Certes, le tournage était intense, fatiguant. Mais quand on voyait le résultat final, une fois que la coiffure, le maquillage et le stylisme étaient achevés, on était émerveillés ! Ce genre d’expérience me fait sortir de mon quotidien, mais aussi avancer dans mon métier. Je m’en donne les moyens. Par exemple, pour La guerre des trônes, j’ai raccourci mes vacances, un peu sacrifié ma vie de famille, j’ai donné du temps et de l’énergie. Mais aujourd’hui, quand je regarde les photos, je suis heureuse.«
Comme la mode est un éternel recommencement, peut-on envisager un retour de cette extravagance ?
« Alors, dans les classes populaires, les femmes portaient déjà les nattes et les torsades. Je ne suis pas sûre que les perruques fassent leur retour mais sait-on jamais ? Ce serait génial ! On vit dans un monde tellement lissé. A part quelques tribus, il n’y a plus de différences entre les groupes sociaux comme c’était le cas à l’époque. La coiffure était un code de distinction, de reconnaissance sociale. Peut-être que si les classes moyennes disparaissent vraiment, le fossé entre les riches et les pauvres se creusera et les plus aisés oseront des extravagances… »
Quelles sont vos actualités pour 2023 ?
« J’ai mis en place de nouvelles formations et notamment autour des nattes collées. Je pense que les tresses de style africain vont être de plus en plus tendance. J’aide les coiffeurs à prendre une longueur d’avance sur l’air du temps et donc être prêts quand la cliente leur demandera telle ou telle coiffure. En parallèle, je créé aussi toujours des collections et me prépare à de nouveaux tournages. »