On le sait tous, les choses évoluent et changent, dans la société comme dans la coiffure, mais qui aurait prédit il y a trente ans que notre métier serait ainsi bouleversé ?
Qui aurait prédit qu’il n’y aurait plus de cash ? Que le coût du travail allait augmenter de plus de 100 % ? Qui aurait prédit que les clients ne viendraient plus toutes les semaines, mais en moyenne une fois tous les trois mois ? Qui aurait prédit que la disparition du franc nous vaudrait 30 % d’inflation ? Que, dans la majorité des salons, l’entrepreneur travaille seul avec un apprenti et qu’il arrive à peine à se verser un smig ?
Qui aurait prédit que 10 000 coiffeurs à domicile, ne payant ni les mêmes charges ni la même TVA, allaient concurrencer le marché ? Qui aurait imaginé que les salariés allaient devoir aider le salon à remplir la colonne de rendezvous en dehors de leurs heures de travail ? Qui aurait imaginé que la condition sine qua none du financement de la retraite du coiffeur entrepreneur serait la vente de son bail et que si celle-ci n’était pas faite comme prévu, cela remettait en cause ladite retraite ?
Qui aurait prédit il y a trente ans que de plus en plus de coiffeurs deviendraient revendeurs grossistes pour survivre ? Que le coût du travail allait rendre tout acte en coiffure moins rémunérateur que la vente de lisseurs ou de sèchecheveux ? En tout cas, pas nous, coiffeurs !
Nous avons passé ces trente dernières années à nous concurrencer, en faisant en sorte que le client paie le moins cher possible. L’inflation nous a alors rattrapés, et même dépassés, au point qu’il nous faut désormais nous « déspécialiser » ! Le constat est sans appel !
Qui aurait pensé que 100 euros de soins appliqués en salon rapporteraient plus que 100 euros de coupe ? Aurais-je pu penser que sur 100 euros de technique en salon, je n’en récupérerais que 6, alors que le gain est de 30 euros sur 100 en revente, et de 40 euros sur 100 en vente de matériels électriques ou dérivés ! Nous sommes devenus des revendeurs ! La coiffure n’est plus qu’un alibi pour attirer le client afin qu’il achète autre chose, car miser sur le seul prix de la prestation traditionnelle revient à ramer sur le sable !
Qui aurait prédit ça il y a trente ans ?
Dans les années 1980, il fallait être bon en brushing. Dans les années 1990, il fallait être un bon coupeur. Dans les années 2000, il fallait s’y connaître en produits coiffants… Désormais, toute cette expertise est nécessaire, plus l’art du « savoir vendre » ! Pour le coiffeur, les années 2010 seront tournées vers la communication et le savoir-être…
Est-ce que j’exagère ?
Cet article est dédié à toutes les personnes qui ont été réticentes (car trop artistes pour cela !) en classe de vente et qui m’ont fait perdre du temps à essayer de les convaincre de l’intérêt et surtout de la nécessité d’apprendre à vendre. Ce qui hier n’était qu’un service en extra est devenu vital ! Aujourd’hui, un coiffeur qui ne vend pas peut être considéré comme « has been » dans la vie du salon, car la vente additionnelle dérivée représente désormais la marge essentielle de l’entreprise. Si les cordonniers ne s’étaient pas réinventés en développant de nouveaux services, comme les clefs, les tampons…, ils n’existeraient plus aujourd’hui !
Qui aurait imaginé cette comparaison avec la coiffure il y a trente ans ?
Par Stephane amaru