Denis Holbecq analyse « Cauchemar chez le coiffeur »

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À l’occasion de la première diffusion de « Cauchemar chez le coiffeur », nous avons demandé à Denis Holbecq, expert reconnu, de nous livrer son analyse… sans langue de bois.

 

Il faut bien parfois s’installer devant le petit écran pour rester informé des sujets qui animent les téléspectateurs et pouvoir en débattre avec eux, mais aussi par curiosité, je dois l’avouer, puisque j’ai moi-même été casté pour ce programme, et heureusement pas retenu… Après réflexion, en « débattre » n’est pas vraiment le terme, tenter de justifier et de défendre la profession me paraît plus approprié ! J’ai moi-même connu des difficultés dans l’un de mes salons. De cette période, j’ai énormément appris et de la situation qui a frôlé le drame, l’entreprise est redevenue saine et prospère. Depuis cinq ans, je mets cette expérience au service des entreprises en difficulté qui font appel à moi, avec lesquelles on étudie tous les points positifs et négatifs. Nous établissons ensemble un plan d’action à court, moyen et long termes en trois phases : gérer les urgences, l’évolution et le maintien.

 

Un programme destiné au public sur une profession souvent mal considérée par le manque de connaissance des métiers de l’artisanat aurait pu mardi soir montrer une légitime belle image de ce beau métier qui est le nôtre. Cette émission classée sous la rubrique divertissement aurait dû me faire passer un bon moment, elle a certainement dû distraire les téléspectateurs, tant le contenu était suffisamment grotesque pour leur donner l’envie de rire à gorge déployée à chaque séquence qui donnait l’occasion de se moquer des coiffeurs et de la profession. Je suis très fier d’être coiffeur, mais visiblement M6 ne les aime pas. Il faut, pour être aimé de cette chaîne, être cuisinier, restaurateur, couturier, joaillier, coach pour chien, pâtissier, médecin, grand Frère, Super Nanny, agent immobilier, décoratrice, boulanger, patron incognito, styliste, chasseur de trésor, mal looké, voire paysan, mais en aucun cas être coiffeur.

 

Scénarisée…

On démarre par une arrivée spectaculaire de l’expert par le train. Bien sûr, on peut y croire ! Et pour commencer à vous pincer, une présentation mélo-grotesque du parcours de Sarah Guetta à qui je reconnais des compétences professionnelles. Je ne ferai d’ailleurs pas son procès, mais plutôt l’analyse du rôle de l’expert que la production de l’émission lui a demandé – ou laissé – jouer. Je me cale dans le canapé, je suis impatient !

 

On attaque !

Quand 20 salons ouvrent, 20 salons mettent la clé sous la porte ! On aurait pu dire : quand 20 salons ferment, 20 salons ouvrent leur porte, mais ça c’est l’histoire du verre à moitié vide ou à moitié plein, on n’allait pas vous faire découvrir un programme avec une note optimiste… RSI, Urssaf, les chefs d’entreprise comprendront, les autres on s’en fout, rappelez-vous que c’est du divertissement… Oups, je m’emballe déjà !

 

Je continue de regarder quand même, allez courage…

Ah, tiens… L’expert est devin, avant même d’entrer dans le salon, de rencontrer les membres de l’équipe et d’observer leur travail, je l’entends dire : « Il y a un réel manque de professionnalisme ici. » Aurait-elle rencontré l’équipe avant ? « Les tarifs sont beaucoup trop élevés », sans connaître la qualité du service qui est proposé. Et d’ailleurs 45 euros chez Magalie et 250 chez Sarah Guetta… Qui est le mieux placé pour faire cette remarque ? L’expert a évoqué dans l’émission TPMP : « Chacun sa cible de clientèle et son libre choix d’exercer les tarifs que l’on considère les mieux adaptés à sa cible. »

Avec un surjeu d’acteur, entre Muriel Robin et Florence Foresti. Mais c’est un expert, donc irréprochablement professionnel, qui coupe les cheveux de Patrick Timsit sans fermer son peignoir pour que ses cheveux s’étalent bien sur le costard… Allez, hop ! Direct sur le procès de Magalie, il faut bien une tête de turc ! Elle est jolie, elle a du tempérament, elle est élégante, c’est peut-être pour ça ? Va savoir…

Je ne connais toujours pas les réelles difficultés de l’entreprise ni les points négatifs, les comportement et compétence professionnelle de chacun, la qualité de travail ressentie par la clientèle, l’emplacement du salon, la fréquentation, le chiffre d’affaires… J’ai beau chercher visiblement tout va bien… Mais, il n’y a rien qui cloche, rien qui explique que l’entreprise soit à la dérive ?

 

Ah, mais oui ! Suis-je bête… Le placard !

placard

Peut-être d’autres indices avec les clients mystère ? On va leur poser la question… Pour vous, quelles seraient les raisons pour lesquelles l’entreprise est en difficulté ? On sous-entend professionnalisme, proximité, emplacement, vétusté, qualité de travail ? Ah, mais non ! Je n’ai toujours pas saisi… Le placard !

 

Allez, un peu d’action…

On essaie de mettre le conflit dans le couple… Ça marche !

Dommage, le « diviser pour mieux régner » n’est pas la bonne méthode en matière de coaching, il est plus habile de fédérer les personnes et les idées, mais apparemment l’expert préfère appuyer là où ça fait mal. On tente la version théâtrale, de trouver le gimmick de l’émission, « c’est jolaille, c’est génial, c’est la folaille, t’es comme ace, si t’as la cheupé… » Ça ne marche pas !

On peut être drôle sans se moquer, certains savent le faire. Christina Cordula « magnifaïque » et Philippe Etchebest « allez, on y croit » conseillent et emmènent les personnes vers le haut en s’appuyant sur leurs valeurs positives, comme je le fais moi-même quand je coache une équipe. Mais là, est-ce un manque de savoir ou une volonté de la chaîne de donner une mauvaise image de l’expert qu’elle a choisi. Peut-être que Sarah Guetta a répondu aux exigences de la production en oubliant les qualités requises pour être un coach expert.

Mais, sans plus attendre, l’évaluation des aptitudes professionnelles de Cathy, cheveux propres ou cheveux sales avant le chignon ? Elle s’en sort bien… Ouf !Mais quelle astuce bidon… et quand bien même si l’élastique scalpe l’expert, on explique… « Il serait mieux pour Cathy d’utiliser des élastiques de qualité supérieure, c’est plus confortable pour votre cliente, ça évite de casser les cheveux et votre cliente aura moins de mal à le retirer chez elle. Faites-moi penser à vous donner les référence du matériel que j’utilise moi-même pour les chignons dans mon salon », avec un sourire et un clin d’œil. Et bien non, un cri, une grimace et une critique, c’est tellement encourageant et formateur !

Capture

L’expert s’y prend mal, Florian le dit face caméra, l’expert en prend conscience. Preuve en est devant la caméra, l’expert ne sait pas se positionner en tant que tel en exprimant de son plein gré : « Je ne sais pas comment m’y prendre avec Magalie, dites-moi comment je dois faire. » L’expert demande conseil aux collaborateurs, ce n’est pas leur job, l’expert perd toute crédibilité.

 

Pour ouvrir le dialogue et faire adhérer les personnes à vos propositions de changement, il faut connaître leur état d’esprit du moment face à la situation, et leurs attentes, pour créer ensemble un plan d’action, un schéma de travail « avant, pendant et après ».

« Les critiques, ça fait avancer. » Et bien non, cher expert, ce sont les conseils qui font évoluer, compétences d’un coach. Et hop ! Dans le panneau ! On mélange tout.

 

 

L’expert :

« Je vais commencer par deux choses en même temps, j’attaque la déco et l’organisation. »

On remet une couche sur le placard, apparemment, c’est lui le coupable ! Est-ce à cause de lui que Magalie et Florian ne parviennent pas à payer leurs charges ? Oh, le vilain placard.

 

Ça commence à devenir pathétique.

Alors, on y va pour les larmes ? Oh cool, ça marche ! Ah ! Enfin ! On peut passer à autre chose.

Les experts arrivent avec des idées ! Ça, c’est une bonne idée, pense-t-on .

experts

Et bien non, visiblement, alors on va faire un petit tour à la Foir’fouille pour acheter une lampe de chevet et quatre pauvres bouts de miroir, 2 ou 3 rideaux pour cacher le bordel, dixit l’expert, quelle belle astuce !

 

Il n’y a visiblement pas assez de matière pour tenir 80 minutes, le monteur a dû perdre une partie des rushs « dans le placard »… Et ceux qu’il a retrouvés, il les a mélangés et dupliqués… Du coup, je vois 3 fois les mêmes séquences et pas dans le bon ordre. C’est le bordel, comme le dit si bien Sarah Guetta. Il pourrait exister de beaux programmes sur notre profession, mais « Cauchemar chez le coiffeur » ne fait que salir deux professions, celle des coiffeurs et aussi celle des coachs. M6 n’aime décidément pas les coiffeurs !

Et bien, non ! Je n’ai pas passé un bon moment mais plutôt 80 minutes « cauchemardesques ».

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